mardi 2 juin 2009

Ravenor - Renaissance

Tome 2 de la trilogie Ravenor, de Dan Abnett, traduit par Nathalie Huet, publié en français par la Bibliothèque Interdite


Quelques années plus tôt, un été qui tape dur et qui nous fait apprécier la fraîcheur de l'ombre, et pour occuper ces journées de farniente, l'achat de mon premier roman de la Black Library/Bibliothèque Interdite, Xenos. Je n'avais jusque là pas vraiment été tenté par les "produits dérivés" des univers Games Workshop, surtout par crainte d'être déçu, et j'ai pourtant lu avidement les aventures de l'inquisiteur, au point d'avoir attendu avec impatience, puis lu avec le même interêt chacun des opus dédiés à Eisenhorn, puis à son disciple Ravenor.
Ce qui nous ramène quelques semaines en arrière, lorsque j'ai commencé la lecture de ce deuxième tome de la trilogie Ravenor. J'étais resté sur un très bonne impression à la fin du premier: le personnage de Ravenor, s'il est rendu un peu moins attachant et un peu moins charismatique que Eisenhorn, est cependant très intéressant: enfermé dans une chaise antigrav, qui relève davantage du cercueil en lévitation, notamment par son aspect lisse et froid, Ravenor est un héros sans visage, un héros exclu de l'action et qui tire sa force à la fois de son intelligence, des formidables pouvoirs psy qu'il a développé, mais également de sa suite.
Ces agents se révèlent vite sympathiques: dotés de forts caractères, parfois archétypaux qui vont du soudard qui astique ses flingues à la ninjette en combi moulante, en passant par le dandy hacker (et plus si affinité) et l'intouchable amateur de porno et de cigares, ils rythment le roman, aidés en cela par une foule de personnages secondaires qui malgré des rôles parfois mineurs, font souvent forte impression dans l'esprit du lecteur. Dan Abnett, passé par l'école du comic, est redoutable à ce jeu là: en quelques lignes, en s'attardant sur un détail, un tic de comportement, une manière de s'exprimer, il crée des personnages très fort y compris pour les plus insignifiants des rôles. On perd en nuance ce que l'on gagne en caractère, et, du chasseur de prime au fonctionnaire de l'administratum, en passant par le psyker corrompu, les portraits dressés sont plutôt saisissants.
Ce sens de la caractérisation prend également son ampleur lorsqu'Abnett évoque les lieux où se déroule l'intrigue. En choisissant des angles de descriptions originaux, en osant certains métaphores très pertinente, il donne vie au monde ruche d'Eustis Majoris. Si le premier tome donnait plutôt dans les bas fonds de la cité, on évoque cette fois davantage la surface de cette société, des bâtiments de l'administratum aux palais des hauts responsables, mais toujours avec une certaine limpidité qui transporte le lecteur directement dans ces lieux. Les décors ne sentent pas le carton pâte, les accessoires sont posés là à propos, et l'ensemble donne une sensation de réalisme qui fait beaucoup de bien à l'amateur de fluff et de background.
Au cours du roman, on verra donc Ravenor et sa suite choisir la clandestinité (je trouve d'ailleurs que ce choix aurait pu être développé bien davantage), enquêter tant bien que mal sur des évènements qui semblent un peu les dépasser, et qui les mettront en danger à plusieurs reprises. On sent d'ailleurs la fragilité de Ravenor, et sa passivité forcée devant la puissance d'adversaires qui mènent le jeu presque jusqu'à la fin, et qui ne seront mis en déroute que grâce à des alliés providentiels, et certains évènements pour le moins inattendus.
Si l'intrigue en elle même est assez basique, parfois prévisible, et manque un peu de liant pour prendre sa juste dimension, les différentes scènes sont en revanche assez dynamiques, à la fois grâce aux personnages évoqués plus haut mais aussi parce que l'action est décrite avec une vraie vivacité. Abnett ne donne pas dans la redite, les combats par exemple ne sont pas des démonstrations pyrotechniques à haute teneur en hémoglobine, mais reste simples, efficaces et dynamiques, et, selon moi, s'intègrent tout à fait à l'ambiance générale du livre. On peut regretter que de temps en temps Abnett aille trop loin, qu'à l'occasion une poursuite s'éternise un peu, qu'il nous décrive l'une après l'autre la mort des 50 victimes du gros méchant, et personnellement, je n'adhère pas complètement à la vision des combats psy qu'Abnett développe, et qui me rappelle un peu le Merlin L'Enchanteur de Disney (et hop je me transforme en gros noursin psychique), mais c'est justement parce qu'ils dénotent de l'efficace sobriété générale que ces travers choquent un peu.
Renaissance est selon moi un roman plutôt efficace, pas dans son orginalité scénaristique ni dans la force de son intrigue (enfin c'est toujours moins pourri que les deux tomes de Gotrek et Félix présentés ici bas), mais bien dans l'efficacité des scènes, des personnages et des lieux. C'est plutôt bien écrit, dans un style qui cherche le meilleur point de vue, ou l'approche orginale, et la lecture est vraiment immersive.
A vrai dire, j'aime beaucoup Abnett, je pense même que pour moi, il a davantage contribué à me ramener vers Warhammer 40000 que ne l'ont fait l'ensemble des publications Games Workshop de ces 10 dernières années. Je suis même persuadé que la Black Library aurait du lui confier la rédaction de l'ensemble de l'Hérésie d'Horus plutôt que de choisir ce travail collégial au résultat assez mitigé, afin que l'univers de 40k dispose enfin de son texte fondateur, correctement écrit.
C'est même la lecture des Eisenhorn, et de Gaunt qui m'a donné l'idée d'un jeu d'escarmouche dont je reparlerais plus en avant d'ici quelques semaines, et malgré certains travers évoqués plus haut, j'adresse un coup de chapeau à cet auteur pour m'avoir remis dans le droit chemin, et tiré du dégoût que m'inspiraient les publications Games Workshop depuis quelques temps. Chez Abnett, tout semble naturel, l'univers du monde ruche et de l'inquisiteur prennent vie et deviennent presque tangibles.
Je tire également le même chapeau à la traductrice qui pour le coup fait vraiment un boulot énorme en livrant un texte fluide, riche et dynamique. Je n'ai pas lu Abnett en VO, mais je dois admettre que cette traduction à sans doute sa part de responsabilité quant au plaisir éprouvé lors de la lecture. Dan Abnett/Nathalie Huet, un tandem très efficace, à recommander à tous les amateurs du 41e millénaire qui souhaient retrouver leur univers sans tomber dans la niaiserie ou dans la médiocrité des certains autres auteurs de la Black Library/Bibliothèque Interdite.


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